Demain, nous plongeons dans l’histoire de l’Afrique du Sud & de Johannesburg : musée de l’apartheid, visite de Soweto et tour dans le centre historique.
J53 / 24 octobre 2018 : Aujourd’hui, nous avons rendez vous avec Alain Samy, un français qui a souhaité partagé ses connaissances sur la ville de Johannesburg où il vit depuis 15 ans en devenant guide. Nous souhaitions vraiment tenter de faire comprendre aux enfants ce qu’a été l’apartheid et ce qu’il en demeure encore aussi, les services d’Alain nous semblait parfaitement adéquats. Nous n’allions pas devoir faire de traduction et risquer de perdre du fond, les enfants pourraient poser leurs questions directement. Sur une thématique aussi importante et lourde, avoir un véritable connaisseur était inéluctable pour nous ! 9h, nous voilà donc partis avec Alain. La journée s’annonce riche puisqu’après la visite du musée de l’apartheid, nous irons nous balader dans le plus vieux township de Joburg : Soweto et terminerons notre visite par le centre historique de la ville.
A peine arrivés à l’entrée du musée, le ton est donné. Les tickets déjà, sont siglés : blancs, non blancs tout comme l’entrée qui propose deux passages : blancs et non blancs.
Le musée est riche, très pédagogique : il retrace l’histoire du pays et les conséquences qui ont menées à la création en 48 de la loi ségrégative, on y suit les vies de ceux qui ont lutté contre celle-ci, Mandela, la presse, les opposants, des vidéos dépeignent ces années de différence, de cloisement et d’injustices, les émeutes, les drames… La présence d’Alain nous est précieuse, il nous explique, répond à nos questions qui parfois peuvent sembler naïves tellement nous sommes estomaqués de l’absurdité des lois qui ont gouvernées ce pays pendant près de 50 ans ! Comment et pourquoi a t-on été capable de valider cela ? Comment et pourquoi la communauté internationale a t-elle pu fermer les yeux à ce point ? Qu’en est-il aujourd’hui ? Est ce que le pays avance ? Ce qui nous marque particulièrement c’est que nous serions une génération apartheid si nous étions sud africains. Enfants, Antoine et moi, aurions appris qu’il y a différentes races, grandit en entendant qu’il est normal que nous soyons différenciés en droits et en devoirs … Les enfants eux, observent beaucoup, posent quelques questions… Pour eux, cela appartient au passé ! Si au moins, nous avons réussi à leur faire comprendre que cela a réellement existé que cela existe encore et qu’il faut s’en révolter, nous aurons réussi à leur transmettre un message important.
Nous terminons la visite du musée sur les images du concert organisé à l’occasion de la proclamation de la nouvelle constitution, un message positif plein d’espoir mais dont la concrétisation est loin d’être réelle, nous allons le découvrir quelques minutes plus tard.
Quelques kilomètres de voiture et nous arrivons dans un paysage tout à différent : la ville clean et aseptisée laisse place à des allées de terre. Nous y sommes : SOWETO pour south west Township, le premier bidonville de la ville, créé pour exclure les noirs de la ville suite à une épidémie de peste et dont ils ne sont jamais revenus. Les deux tours de l’ancienne centrale électrique reprennent l’ensemble des symboles des communautés noires : la musique, les coiffures, le sport … Comble de l’atrocité, cette centrale au coeur du Township alimentait toute la ville en électricité sauf le dit quartier !
25 ans après la promulgation de l’arrêt de l’apartheid, rien ne semble avoir changé ! Il n’y a ni accès à l’électricité ni à l’eau courante, pas d’asphalte ou de goudrons, les murs et toits des logements sont fait de tolles, les latrines sont publiques et partagées, le sol jonché de détritus, verres cassés. Sur chaque petite case, un chiffre que le gouvernement a peint il y a plus de 25 ans, pour donner en théorie l’accès à un logement social qui n’a toujours pas vu le jour ! Nous déambulons, circonspects, silencieux dans les petites allées. Pour tout vous dire, à l’origine, nous étions dubitatifs de l’aspect quelque peu voyeuriste qu’une ballade dans le bidonville pouvait avoir, mais, Alain, travaille et reverse une partie de ses recettes à une ONG sur place qui a compris qu’en montrant les conditions de vie, une prise de conscience pourrait en ressortir et les aider.
Nous rencontrons ainsi Peter du centre communautaire The Shalk . Leur projet est de faire naitre l’espoir auprès des enfants du township. Ainsi, quotidiennement, environ 60 enfants y sont pris en charge. Agés de 6 mois à 16 ans, ils y reçoivent un repas, souvent le seul qu’ils auront de la journée, sont aidés pour leurs devoirs, découvrent des activités sportives, ou sont tout simplement écoutés, gardés… Nous y apprenons qu’ici les ONG, communautés, centres, ne reçoivent absolument aucune aide de l’état. L’Etat qui ne semblent rien faire pour bouger les choses, lutter contre l’injustice qu’il a mis en place ! Le sentiment fataliste présent ici est vraiment difficile à assimiler et accepter ! Nous ressortons de cette visite sans espoir et c’est très dérangeant !
Après un déjeuner très sympa dans le jardin de la seule guesthouse de Soweto, nous nous dirigeons vers la maison de Mandela, celle de Desmond Tutu qui sont dans la même rue : la rue aux deux prix nobels ! Puis, vers certaines rues tristement célèbres, notamment la place Hector Pieterson, cet enfant de 12 ans sur lequel la police a ouvert le feu en juin 76 lors d’une marche pacifique des écoliers des townships contre l’enseignement obligatoire de l’Afrikaans en remplacement de l’anglais à l’école. C’est d’ailleurs la mort de cet enfant qui donnera l’alerte internationalement grâce à un journaliste présent sur place pour immortaliser la violence répressive de la police. Au total, 574 personnes sont mortes ce jour là dans les affrontements, des adolescents en majeure partie.
En début d’après midi, nous quittons le Township en direction du centre de Johannesburg. La ville créée suite à la découverte d’or dans ses sols par deux explorateurs, est agrémentée de toutes parts d’anciens outils, machines servants à puiser ou extraire le précieux métal. Anecdote caucasse : lors de la construction de la plus grande banque de Joburg, les ouvriers ont découvert des galeries d’une ancienne mine … La dite galerie a été conservée et en entrant dans la banque, il est possible de descendre la voir.
La visite est passionnante et Alain y est pour beaucoup ! Nous découvrons des bâtiments art décos, Eiffel, certains totalement laissé à l’abandon ! En 94, les blancs qui y vivaient les ont précipitamment quitté de peur de représailles. Depuis, ils ne sont n’y habités, ni réhabilités ni même entretenus. Nous passons donc d’un immeuble à l’autre aux architectures magnifiques mais tous délabrés, sales, vides. L’Etat ici, ne fait une fois de plus rien ! Nous terminons notre marche par l’ancien cabinet de Mandela, en face du tribunal de justice et par le premier chantier d’immeuble qui a démarré il y a quelque mois … Vous imaginez ? C’est le premier chantier de construction dans la ville depuis plus de 25 ans ! Serait-ce une petite lueur d’espoir ? Pas spécialement puisque le chantier est privé ! Il faudra encore bien des années pour que les choses bougent, Alain nous projette dans 30 ans, un bon moyen de terminer sur des notes à peu près positives.
Nous rentrons assez fatigués de cette journée incroyablement riche en enseignements, découvertes et émotions. Merci Alain pour ce partage. Pour diner, nous nous rendons au stalla, un petit italien dans la 4ème avenue à Melville très sympa et rentrons assez tôt car le programme de demain est tout aussi chargé !
Demain, nous faisons une surprise aux enfants : direction le parc d’attractions de gold reef, se faire tremper, chercher de l’or et descendre à 75 mètres sous la terre pour visiter une ancienne mine d’or ! Alors, à demain.
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